Le 24 octobre dernier se tenait, avec les couleurs d’automne de l’Auberge des Gallant, ce symposium annuel regroupant 115 personnes en présentiel et 75 en mode virtuel : entreprises touristiques, associations touristiques régionales, associations touristiques sectorielles, exposants, étudiants et représentants gouvernementaux ayant en commun l’intérêt sincère de contribuer à un nouveau tourisme, le thème de l’évènement.
Tout au long de cette journée, des intervenants du milieu et des panélistes sont venus tour à tour nous exposer leur vision, leurs initiatives et leurs expériences.
Mylène Paquette : inspirante et touchante !
Animée avec doigté, humour et intelligence par la journaliste et auteure Marie-Julie Gagnon, la journée a débuté par une aventure hors norme.
TDQ souhaitait pour cette année nous ramener à l’essentiel en ce début de journée : le facteur humain dans notre chemin transitoire vers un tourisme rayonnant de bons sens. Et si prendre soin de la planète, de nos activités, de nos communautés, de notre biodiversité et de nos visiteurs passait aussi par un peu plus d’empathie, d’écoute, d’humilité et de déconstruction… Se dépasser oui et prendre action oui, mais quel chemin emprunter et quelle attitude adopter face aux défis ?
L’aventure dans l’aventure ou comment Mylène Paquette nous a raconté sa traversée et nous a inspirés avec son cheminement personnel. Sa traversée solo à la rame de l’Atlantique Nord (1) (une première mondiale, 129 jours en mer et 10 chavirages) fut un exploit physique et mental exceptionnel en 2013.
Son partage sensible, sincère et touchant, des leçons de vie apprises a bousculé beaucoup de monde à en voir l’émotion palpable dans la salle. Une vraie conférence de motivation avec l’intelligence du cœur en prime. Avec un trait d’humour, elle nous rappelle que face à la tempête Humberto comme face aux changements climatiques, notre attitude et notre posture font toute la différence. Dans l’adversité, Mylène Paquette a testé la visualisation pour se représenter un monde meilleur et positif, et a changé de paradigme en se demandant ce qu’elle pourrait faire de différent pour se sentir en sécurité. Selon elle, se sentir bien est une priorité et essentiel dans tout défi relevé. Le parallèle avec nos enjeux de transition durable était trop beau. Elle nous a fait part de sa vision aussi sur les détours “Il n’y a pas de détour, que des apprentissages”. Les détours permettent de découvrir, de s’enrichir et d’élargir sa pensée. Et si on réapprenait à prendre notre temps, à valoriser les détours, à être attentifs à nos ressentis et aux bienfaits des chemins de traverse. Pour finir, son aventure n’aurait pu être réalisée sans l’aide de toute une équipe derrière. Son message : entourons-nous, allons chercher les expertises qui nous manquent, collaborons et comptons sur les forces de chacun. Sa rencontre avec le Queen Elisabeth II, en pleine mer, aura aussi marqué les esprits.
Tourisme durable Québec – réalisations 2023
Tourisme durable Québec a poursuivi avec la présentation des réalisations 2023 de l’organisation. Geneviève Turner (la dynamique directrice générale pollinisatrice) et Sandra Gauthier (la présidente du CA, Gaspésienne engagée et directrice d’Exploramer) nous ont fait un tour d’horizon :
- La création d’un lexique du tourisme durable comprenant 150 termes avec l’objectif d’uniformiser notre compréhension de termes parfois complexes et d’utiliser le même vocabulaire et concept. L’outil est accessible gratuitement à tous.
- La réalisation d’un répertoire des organisations membres de TDQ et de leurs initiatives responsablesauquel les organisations, comme les citoyens et les touristes, peuvent se référer pour trouver des entreprises, des ressources ou des exemples d’actions en lien avec le tourisme et le développement durable.
- Une nouvelle section « Développement durable pour les nuls » proposant des contenus gratuit et vulgarisés permettant de faciliter la compréhension d’enjeux et d’action en lien avec le tourisme durable sur le site web de TDQ.
- L’élaboration d’un outil pour aider les organisations à réaliser un bilan carbone. Le Bilan carbone tourisme, actuellement en test auprès de 40 PMEs, sera disponible gratuitement cet hiver. Il a été développé en collaboration avec Aventure Ecotourisme Québec, PAR Conseils et par la Chaire en écoconseils de l’UQAC).
- L’officialisation d’une nouvelle entente de partenariat avec l’Alliance de l’Industrie touristique du Québec et la co-création d’une table de concertation des responsables en Développement durable regroupant les associations touristiques régionales.
- Des discussions et la représentation du secteur touristique auprès d’Ouranos, Consortium sur la climatologie régionale et l’adaptation aux changements climatiques.
- L’expérimentation d’un parcours en 7 étapes pour accompagner les organisations à intégrer le développement durable dans leurs pratiques d’affaires (document de référence de 35 pages exclusif aux membres) qui sera actualisé sous peu.
L’outil GPC-ODD par la Chaire Écoconseil
Claude Villeneuve et Yasmine Benbelaid de l’UQAC ainsi que Delphine Martinez de Tourisme Mauricie ont présenté un nouvel outil réalisé dans le cadre d’un stage postdoctoral. La Grille de priorisation des objectifs du développement durable (GPC-ODD) est un outil adapté au secteur touristique permettant aux petites et moyennes entreprises (PME) de rattacher leurs initiatives de terrain aux diverses cibles des objectifs du développement durable (ODD). Elle permet de diagnostiquer, prioriser de manière pratique les ODD, analyser l’impact des nouvelles initiatives sur d’autres cibles, et élaborer des plans d’actions et des indicateurs à toutes les échelles.
Actuellement en test avec Tourisme Maurice et 3 autres ATR, cet outil sera gratuit et vise autant les associations régionales que les entreprises. Contrairement aux labels et certifications qui ont une approche « Top/down », cet outil part des réalités de la région et des entreprises pour ensuite remonter vers les cibles des 17 ODD.
Claude Villeneuve, philosophe, sage et l’un des premiers écologistes du Québec conclut que ” l’avenir n’est pas écrit et que le succès en tourisme sera de savoir gérer l’incertitude ».
La Réserve internationale de ciel étoilé du Mont-Mégantic et la pollution lumineuse
Dans cette nouvelle formule « Développement durable pour les nuls » en 10 minutes, Dany Gareau est venu nous parler de l’impact de l’éclairage sur la qualité de vie des citoyens ainsi que sur l’observation du ciel. Seul le tiers (1/3) de l’humanité peut voir la Voie lactée à cause de la pollution lumineuse. 30% de l’éclairage artificielle pointe actuellement vers le ciel. Ce phénomène représente un gaspillage d’argent en plus de nuire au processus migratoire de plusieurs espèces d’oiseaux. Heureusement, il existe de multiples solutions applicables dès maintenant, partout au Québec. D’ailleurs, la ville de Sherbrooke est maintenant reconnue comme « Oasis de ciel étoilé » de l’association « Dark Sky International » pour ses efforts afin de contrer la pollution lumineuse.
Le tourisme durable au-delà de l’ambition stratégique, une nécessité pour la filière tourisme avec Jean Pinard, directeur général de Destination Occitanie
L’une des 13 régions de France, l’Occitanie intègre le loisir au tourisme. Partant du principe que 60% des Français voyagent, le potentiel de croissance du tourisme intérieur est élevé surtout en combinant loisir et tourisme, et ce, avant même de penser au tourisme international. Jean Pinard propose et pose la question de la réhabilitation du voyage et des loisirs et de passer d’une économie du tourisme vers une économie récréative. Il propose d’adapter notre offre au temps libre des citoyens et des clientèles de proximité et mentionne qu’il y a un nouvel élan autour du récréotourisme.
- Pinard amène également la question fondamentale pour les destinations : le développement et la croissance, quelles limites, quels indicateurs se donne-t-on ? Augmentation des revenus, nouveaux marchés et nouvelles clientèles? Qualité des emplois, taux de départ moins élevé, bien-être des employés, qualité de l’expérience, une part des loisirs plus importante, une mobilité des touristes plus large sur le territoire, une accessibilité universelle, etc.? Ne pourrait-on pas collectivement revoir nos indicateurs de croissance pour une industrie qui fait plus de sens et adaptée au contexte de la crise que nous vivons ?
Il souligne qu’il faut faire la différence entre le surtourisme qui est à éviter et le tourisme de masse, qui lui vise à rendre le tourisme accessible pour tous. Mais il faut parfois limiter, interdire ou fixer des quotas, car le tourisme impacte la nature et les sociétés. « La seule manière pour contrôler l’impact du tourisme dans des lieux peu ou pas habités est de ne pas s’y lancer ! »
Faciliter les déplacements constitue le cœur de la stratégie de Destination Occitanie, qui offre des déplacements en train à 1 euro les fins de semaine pour les 18 à 25 ans ainsi que des déplacements illimités à 10 euros par jour, pour tous, avec le nouveau programme Occitanie Rail Tour (2).
L’Économie sociale comme levier en tourisme durable
Andrée Pelletier (Coopérative de développement régional du Québec) et Étienne Beaumont (Vallée Bras-du-Nord) Photo : Mélanie Jean Photographe
Andrée Pelletier de la Coopérative de développement régional du Québec et Étienne Beaumont de Vallée Bras-du-Nord sont venus nous parler de la force et de la résilience de l’économie sociale (coops, OBNL, mutuelles) composée de 11 200 entreprises qui ont un taux de survie deux fois plus élevé que les « inc. ».
Étienne a parlé avec fierté du Projet en Marche (3) qui existe depuis 20 ans à Saint-Raymond de Portneuf en tourisme, intégrant chaque année une dizaine de jeunes en réinsertion sociale. Vallée-Bras-du-Nord a également 1 employé dont l’une des responsabilités est de sensibiliser et de communiquer avec la population.
Panel des bonnes pratiques: “On lâche pas la patate”
La liste des initiatives durables de ces entreprises/associations est impressionnante allant de l’implantation des machines distributrices Kupa Stations au rôle social important joué par Aventure Rose-des-Vents dans la communauté de Sainte-Rose-du-Nord ou encore la transition énergétique des pourvoiries, dont la possibilité de microturbines.
Conclusion
Un symposium mature et inspirant qui traduit en 2023, le dynamisme des AT dans la durabilité et la vision de plus en plus de PMEs qui agissent dans leur quotidien. Tous les participantes et les participants ont réellement vibré à cette communion d’esprit positive. Sandra Gauthier, la présidente de TDQ a terminé la journée avec un discours bien senti sur l’importance de l’authenticité, du partage (dont de multiples outils déjà en place ou à venir sous peu), de travailler ensemble et de savoir s’entourer.
Merci à Olivier Donzelot et Geneviève Turner les co-organisateurs, ainsi qu’à tous les bénévoles qui permettent à TDQ d’évoluer.
Un coffret de rediffusion sera acheminé à toutes les personnes ayant participé et sera mis en vente au grand public.
Merci aux commanditaires:
Tourisme Montérégie et Ministère du Tourisme – Partenaires Solidaires
RECYC-QUÉBEC – Partenaire écoresponsable
Coopérative de développement régional du Québec (CDRQ) – Partenaire Stratégique
Enfin, merci à tous les autres partenaires/collaborateurs ainsi qu’aux exposants du salon « En mode solutions » du symposium qui ont su capter l’intérêt des participants.
Ce texte a été repris et adapté à partir du texte original de Jean-Michel Perron avec son autorisation.(4)
Sources
(1) Sa traversée solo à la rame de l’Atlantique Nord
(3) Projet en Marche
(4) Symposium annuel de Tourisme durable Québec : la force tranquille d’une communauté vraiment engagée!, par Jean-Michel Perron, Tourisme Express paru le 31 octobre 2023