Depuis sa désignation internationale par l’UNESCO en 2007, la Réserve mondiale de la biosphère Manicouagan-Uapishka (RMBMU) s’est engagée à faire de la région de Manicouagan-Uapishka un modèle de développement durable. Elle fait partie d’un réseau international comprenant actuellement 734 sites, dont 19 au Canada.
Contrairement à ce que son nom pourrait suggérer, la RMBMU est bien plus qu’une simple aire protégée. Elle sert de lieu d’apprentissage où tous les acteurs du développement régional sont invités à collaborer afin de trouver des solutions conciliant la conservation de la biodiversité et l’utilisation durable du territoire.
Bonnes pratiques de gestion : Une approche de gestion territoriale axée sur le savoir et la participation
Mise en contexte : Le tourisme dans l’arrière-pays de la Manicouagan et ses défis
En raison de son isolement et de son éloignement, le territoire de l’arrière-pays de la Manicouagan présente de nombreux défis touristiques. Le principal enjeu est de concilier de façon durable le tourisme et les activités de conservation.
Le principal pôle d’intérêt touristique inclut l’ensemble du lac-réservoir Manicouagan et les monts Uapishka (Groulx), comprenant la réserve de biodiversité Uapishka. Le massif des monts Uapishka (Groulx), avec une trentaine de sommets dépassant les 1 000 mètres, est l’un des rares massifs de cette envergure au Québec à être demeuré à l’état sauvage tout en étant accessible par la route.
La diversité des écosystèmes, la qualité de l’enneigement, les dénivelés et les panoramas uniques du massif des monts Uapishka (Groulx) en font un secteur exceptionnel d’un point de vue touristique. Le territoire attire de plus en plus de touristes depuis ces dernières années, particulièrement des adeptes de motoneige hors-piste et de randonnée de longue distance (ski, raquette, pédestre). Situé sur le Nitassinan, territoire ancestral de la communauté des Innus de Pessamit, ce secteur demeure aujourd’hui un lieu d’importance pour l’innu-aitun, soit la pratique d’activités traditionnelles et contemporaines liées à la culture innue (voir aussi communauté autochtone et communauté d’accueil dans le Lexique TDQ).
La Station Uapishka (1), une station d’écotourisme et de recherche cofondée par la RMBMU et le Conseil des Innus de Pessamit, répond aux besoins d’information, d’hébergement et de restauration des visiteurs. On y retrouve également des activités éducatives afin de les sensibiliser à l’importance des monts Uapishka (Groulx) en tant que lieu de recherche, d’occupation innue et de transmission culturelle.
De toute évidence, l’augmentation des usages récréotouristiques sur un territoire protégé comme la réserve de biodiversité Uapishka pourrait entrainer des risques de dégradation du milieu et de perturbation de la faune, particulièrement dans la zone alpine des monts Uapishka (Groulx). Ces risques incluent le piétinement de la végétation alpine ou encore des activités humaines nuisibles (ex. déchets, feux de camps, etc.). Les changements climatiques pourraient également avoir un impact important et affecter les écosystèmes sensibles et fragiles de l’arrière-pays. Heureusement, des mesures d’adaptation et de prévention ont été mises en place par l’équipe de la RMBMU.
Comité de gestion de la réserve de biodiversité Uapishka
Pour mieux prévenir les conflits d’usage entre les activités motorisées et non motorisées, comme la motoneige et le ski, un comité de gestion de la réserve de biodiversité Uapishka a été créé en 2009. Ce comité est constitué de manière à représenter les différentes parties prenantes dans la gestion de l’aire protégée, incluant la communauté innue de Pessamit, des chercheurs, l’industrie touristique, des usagers du territoire, des groupes environnementaux et les autorités publiques (lire aussi Qui sont vos parties prenantes?). Il a été choisi d’adopter une approche de gestion territoriale participative.
Grâce à la concertation, le comité de gestion encadre la conciliation des usages et le développement de projets communs de conservation et d’utilisation durable du territoire, tout en répondant aux besoins et aux intérêts locaux (voir acceptabilité sociale et conflit d’usage dans le Lexique TDQ). Pour guider la prise de décisions en matière de conservation, un programme de suivi de l’intégrité écologique a été mis en place aux cours des trois dernières années, mobilisant et développant les capacités locales en matière de recherche et de surveillance.
En résumé, cette approche repose sur l’intégration des données scientifiques, des savoirs autochtones, ainsi que des meilleures pratiques éprouvées pour promouvoir un tourisme responsable et durable en contexte nordique. Après 15 ans de gestion participative, le résultat est une amélioration continue dans la conciliation des intérêts des diverses parties prenantes, ainsi qu’une augmentation de la sécurité pour tous ceux qui utilisent le territoire.
Un petit conseil pour la route!
Un équilibre entre tourisme et conservation du milieu : c’est possible!
En 2022, la RMBMU a été choisie par le ministère du Tourisme pour piloter un projet de trois ans intitulé « Vitrine en tourisme responsable et durable en contexte nordique ». Ce projet vise à reconnaitre l’exemplarité de la gestion territoriale participative du comité de gestion, en mettant en avant une approche axée sur la participation et les meilleures pratiques en matière de tourisme durable et responsable dans la réserve de biodiversité Uapishka.
Le projet Vitrine a pour objectif spécifique de documenter et expérimenter les meilleures pratiques en matière de tourisme durable et responsable en contexte nordique, donc au nord du 49e parallèle, ainsi que de générer et diffuser des connaissances sur des sujets tels que la lutte et l’adaptation aux changements climatiques, la conservation des milieux naturels et les impacts positifs des actions de concertation sur l’expérience touristique.
En démontrant l’impact positif potentiel d’un tourisme durable sur la préservation des écosystèmes, la Vitrine vise à fournir aux acteurs locaux les outils nécessaires pour équilibrer le développement touristique et la protection du milieu.
Voici quelques constats qui en ressortent :
- Le tourisme peut avoir un impact positif sur la lutte et l’adaptation des changements climatiques, ainsi que la protection des écosystèmes ;
- Les activités de conservation du milieu naturel peuvent améliorer la qualité de l’expérience touristique et générer des retombées bénéfiques sur le territoire ;
- Une gestion territoriale intégrant les savoirs autochtones, les connaissances scientifiques et les préoccupations des acteurs locaux établit une base solide pour un tourisme responsable et durable.
Pour terminer, un guide des bonnes pratiques en tourisme durable en contexte nordique devrait être publié sous peu dans le cadre du projet Vitrine. Celui-ci sera largement diffusé afin d’inspirer l’ensemble de l’industrie touristique à porter un regard nouveau sur ses pratiques. Restez à l’affût!
Envie de rejoindre le mouvement TDQ? C’est par ici pour connaître les avantages et par ici pour l’adhésion.
Sources :
(1) Station Uapishka
Pour aller plus loin :
- Plus sur la Vitrine en tourisme responsable et durable en contexte nordique
- Rediffusion du Café Jasette – La recherche au service du tourisme (enregistrement gratuit disponible dans l’accès membre)