28 mars 2023

La biodiversité en tourisme : pourquoi c’est important ?

Pollen d'un pissenlit sur le sol

 “La biodiversité nous concerne au premier chef, car la biodiversité c’est nous, nous et tout ce qui vit sur Terre.” Hubert Reeves

La biodiversité est essentielle à la (sur)vie humaine. C’est pourquoi la perte des milieux naturels (qui sont les lieux de vie des différentes espèces vivantes) est un enjeu majeur qu’il faut prioriser.

 

Dans biodiversité ou diversité biologique, des synonymes, on retrouve “bio” du grec signifiant “vie” ainsi que diversité (ou variété). On sait qu’il faut manger varié pour obtenir tous les nutriments nécessaires afin d’être en bonne santé!? Eh bien, pour la planète, c’est pareil, on doit y retrouver de la diversité afin qu’elle soit en santé !

La biodiversité à notre service

Tous les êtres vivants (humains, plantes, animaux, insectes…) vivent en effet en relation et bénéficient les uns des autres en s’échangeant des services (nourriture, protection, habitats…) au sein d’écosystèmes. Un écosystème, au sens de l’écologie, c’est un milieu de vie, ou tout et chacun est relié. On y retrouve tout le nécessaire pour bien vivre. Par exemple, le fleuve Saint-Laurent est un écosystème où chacun de ses occupants doit pouvoir se nourrir, s’abriter, etc.

Ce qu’il faut retenir est que chaque espèce vivante a son rôle à jouer au sein du groupe et est importante pour que tout fonctionne bien. Nous, humains, avons besoin de tous les organes de notre corps (ou presque) pour bien fonctionner, disons que c’est un peu le même principe. Il faut savoir que les relations entre les différents écosystèmes sont aussi importantes. Tout est lié et lorsque l’équilibre est perturbé, nous sommes tous en danger.

En effet, nous sommes très dépendants des services que nous retirons de la diversité biologique (voir services écosystémiques). Ce sont les écosystèmes en santé qui nous permettent d’avoir accès à de la nourriture, à de l’eau potable ainsi qu’à une atmosphère viable où l’on peut respirer de l’oxygène (assez vital !).

 

Le problème : la perte de biodiversité

La perte de biodiversité, c’est la disparition d’espèces vivantes. Ces espèces peuvent disparaître pour plusieurs raisons, mais cela est toujours dû à un déséquilibre, par exemple :

-parce qu’elles n’ont plus de lieu où vivre ou de nourriture ;

-parce qu’il y a trop ou pas assez de prédateurs.

Où en sommes-nous ?

Selon la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), 75% de l’environnement terrestre et 66% de l’environnement marin sont déjà gravement altérés (1).

La difficulté que nous avons actuellement est que l’on n’arrive plus à répondre à nos besoins tout en permettant aux autres habitants de la terre (humains ou non-humains) de répondre aux leurs. Bien sûr, nous, les humains, avons besoin de nous nourrir et de nous loger aussi bien que toutes les autres espèces vivantes. Cependant, on pourrait croire que nous sommes en train de devenir nous-mêmes une espèce envahissante. Couper du bois pour se construire une maison, cueillir des aliments, pêcher ou chasser pour se nourrir, jusque-là, ça allait. Mais nos besoins, aujourd’hui, sont loin de se limiter aux besoins essentiels et nous commençons à être un peu plus nombreux qu’avant !

 

Les plus grandes menaces pour la biodiversité

Le développement économique sous sa forme dominante actuelle (croissance illimitée) est une des principales causes du problème (voir aussi décroissance). En effet, l’impact des activités humaines contribue à créer des déséquilibres menant à la disparition d’espèces. Voici les plus grandes menaces de la biodiversité ainsi que des exemples d’activités humaines créant des déséquilibres (Sources multiples (2)) :

  • La perte et la fragmentation d’habitats, par exemple, lors de changements d’usage des terres et de la mer, de l’expansion des zones urbaines (habitation humaine), etc. ;
  • La pollution des milieux naturels limitant l’accès à de la nourriture et à un habitat sain par exemple lors d’usage de pesticides en agriculture. La simple présence d’activités humaines (ex. pollution sonore, pollution lumineuse) peut également nuire à la capacité de reproduction de certaines espèces ;
  • Les changements climatiques se manifestant par des inondations, sécheresses, maladies, etc. et étant dues à l’augmentation des gaz à effet de serre (GES) rejetés dans l’atmosphère en trop grande quantité. Ces conséquences affectent la disponibilité de la nourriture et les habitudes de migration par exemple ;
  • La surexploitation, souvent dû à un manque de législation ou à un manque de connaissances menant au prélèvement de ressources (coupes forestières, extractions minières, mauvaises pratiques de pêche commerciale, surpêche, commerce des espèces menacées qui justifient le braconnage etc.) surpassant la capacité de régénération naturelle peut mener à une diminution d’une population. On peut alors se retrouver avec trop ou pas assez de prédateur ou de proie.
  • L’introduction d’espèces envahissantes, l’augmentation de la population d’une espèce qui privent d’autres espèces de survivre en accaparant toutes les ressources et en prenant trop d’espace.

Lien entre perte de la biodiversité et les changements climatiques

Les changements climatiques sont autant une menace qu’un déséquilibre en soi. En effet, les activités humaines sont responsables de l’accélération des changements climatiques (3) et ceux-ci accélèrent la perte de la biodiversité, ce qui accélère à son tour les changements climatiques. C’est un cercle vicieux en quelque sorte. Ces changements ajoutent une difficulté pour les espèces vivantes déjà perturbées et amènent des conséquences sur leur évolution. La nature est bien organisée et les espèces sont capables de s’adapter aux changements qui surviennent dans leur environnement, mais si cela se passe plus vite que prévu, cela peut causer des dommages irréparables (4).

Que pouvons-nous faire en tourisme ? 

Voici quelques pistes d’actions qui contribuent à lutter contre la perte de la biodiversité en tourisme :

 

La réduction à la source

C’est simple, la réduction à la source est la pierre angulaire de toute démarche visant à diminuer l’impact des activités humaines sur la nature et sur les sociétés.

  • Par exemple, limiter la consommation non essentielle et maximiser l’utilisation des ressources naturelles sont deux actions pertinentes aux défis auxquels nous faisons face aujourd’hui. (Voir aussi écoconception, 5RVE, économie circulaire, économie de partage, capacité de support, empreinte écologique, empreinte carbone)

Préserver l’attractivité, la valeur du paysage

Lutter contre la perte de la biodiversité, c’est aussi protéger nos paysages. On le sait, ceux-ci ont une valeur inestimable pour l’activité touristique, ils sont en fait très souvent, le produit touristique lui-même ! C’est notre monnaie d’échange.

  • Initier des projets de recherches ou rejoindre des groupes de protection de l’environnement de votre région sont des actions qui peuvent faire une différence.

Justement, une nouvelle étude sur la valeur des paysages vient d’ailleurs d’être publiée par Tourisme Saguenay-Lac-St-Jean. Celle-ci permettrait “d’inventorier, de qualifier et de classifier les paysages régionaux selon leur valeur environnementale, culturelle/patrimoniale, esthétique/emblématique et sociale, en plus d’évaluer leur valeur économique totale”. (5)

Nos paysages sont aussi des milieux de vie pour toutes les espèces vivantes qui constituent la biodiversité essentielle à la survie de tous. Il est donc primordial de

  • Redéfinir notre relation au territoire et à la nature, de s’en rapprocher par des expériences riches et vraies (voir authenticité et tourisme de masse) et de s’inspirer de la nature pour guider nos décisions ou nos actions . 

 

Actions en lien avec la communication, par exemple :

On aime ce qui nous a émerveillé, et on protège ce que l’on aime.” Jacques-Yves Cousteau, Océanographe, Scientifique (1910 – 1997)

  • S’informer. Profitez de vos temps libres ou de vos vacances au Québec pour visiter un musée ou un attrait ayant la vocation de sensibiliser les publics à la préservation et à la connaissance des milieux naturels. C’est d’ailleurs exactement la mission d’Exploramer en Gaspésie qui se spécialise dans tout ce qui touche le milieu marin de notre cher Saint-Laurent ;
  • Informer, sensibiliser les visiteurs (voir aussi communication responsable) :
    • Sur les espèces présentes sur votre lieu d’activité par exemple et communiquer sur les différentes actions que vous prenez afin de limiter les impacts de celles-ci sur la faune et la flore ;
    • À adhérer aux Principes Sans trace en installant une signalisation adéquate, des sites de camping bien délimités, des points tri des matières (recyclable, compostable);
    • À l’aide de panneaux d’interprétation, messages sur les médias sociaux, activités éducatives, etc. (Voir aussi écoconception et numérique responsable).

 

Actions en lien avec l’implication sociale, par exemple :

  • Encourager et permettre à vos employés (ou aux visiteurs) de faire du bénévolat et d’organiser ou de prendre part à des corvées de nettoyage, d’aménagement de bandes riveraines, de plantations ou encore à un bioblitz (6), c’est à dire, un inventaire éclair impliquant des scientifiques bénévoles et des citoyens. Attention toutefois de vous assurer que vos actions sont réellement bénéfiques (voir aussi volontourisme) ;
  • Encourager son personnel ou sa clientèle à documenter ses observations de la nature pour contribuer à l’amélioration des connaissances sur les espèces. Des applications ou sites web comme i-naturalist (7), e-bird (8), ou l’atlas des amphibiens et reptiles du Québec (9) permettent de compiler et partager des données sur la faune et la flore;
  • Faire des dons à des organismes de conservation afin de permettre à des experts de veiller à ce que des actions concrètes et cohérentes de conservation soient posées pour lutter contre l’enjeu de perte de la biodiversité. 

 

Actions en lien avec la conservation de la biodiversité :

  • Prévoir et réduire au maximum l’impact de ses activités (voir aussi utilisation durable, implantation à moindre impact et utilisation à moindre impact)
  • Prévenir, protéger, préserver (voir aussi protection)
  • Guérir, réparer (voir aussi restauration écologique)

 Pour terminer, gardons toujours en tête que nous ne sommes pas seuls à vivre dans la biosphère (la biosphère, c’est tous les écosystèmes de la terre où la vie est présente). Ses ressources, nous sommes censés les partager, car elles ne sont pas illimitées et qu’elles appartiennent à tous ses habitants (humains ou non-humains). Il est donc important dans tous les cas de respecter nos colocataires terrestres autant que les générations futures. La transition durable, c’est la construction d’un monde nouveau et cela passe par de nouvelles façons de faire des choix. Qui sait, peut-être arrivons-nous au jour où nous donnerons automatiquement une voix à l’ensemble des êtres vivants en les considérant comme des parties prenantes lors des prises de décisions ? 

Texte par pollinisatrice Geneviève Turner, TDQ

 

Sources:

(1) Communiqué de presse: Le dangereux déclin de la nature: Un taux d’extinction des espèces « sans précédent » et qui s’accélère (IPBES, 2019)

(2) Sources multiples:

(3) Le réchauffement de la planète s’accélère à un rythme sans précédent et il est bien dû à l’activité humaine, GIEC (2021)

(4) Sensibilités et adaptation des écosystèmes et des secteurs, Gouvernement du Canada (2023)

(5) Étude sur la valeur économique et sociale des paysages du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Tourisme Saguenay-Lac-Saint-Jean (2023)

(6) Pleins feux sur… la recherche et les bioblitz, Gouvernement du Québec (2023)

(7) iNaturalist.ca (2023)

(8) eBird Québec (2023)

(9) L’Atlas des amphibiens et reptiles du Québec (2023)

 

Pour aller plus loin :

Lectures :

Les 3 niveaux de la biodiversité, Projet écolo (2021)

Stratégie sur les espèces exotiques envahissantes

Indicateurs de la biodiversité

La terre, la vie et nous: parlons d’espoir et de solutions (2020), Collectif

Pour en savoir plus sur l’impact de l’utilisation des pesticides et sur les pratiques agricoles plus respectueuse : Pour le bien de la terre (2021), Louis Robert

Pour le plaisir : L’oiseau rare, Yanick Villedieu (2021)

Documentaires :

Pour en savoir plus sur les interrelations de la biodiversité : Tout est possible (The Biggest Little Farm) – disponible sur Netflix

Pour en savoir plus sur le sujet de la surexploitation des ressources de la mer : La pêche en question (Seaspiracy)- disponible sur Netflix

Pour en savoir plus sur l’importance de la santé des sols : L’agriculture régénératrice (Kiss the ground)- disponible sur Netflix

Balado :

L’histoire omise de la pêche au Québec avec Sandra Gauthier, directrice générale d’Exploramer

 

 

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