18 avril 2023

Écoblanchiement : attention de ne pas sombrer du côté obscur de la force!

Ce n’est pas parce qu’une entreprise affiche ses couleurs qu’elle est tout à fait dans le ton. En voulant laver plus blanc que blanc, certaines diluent leurs messages dans un océan d’informations plus ou moins proches de la réalité. Suffit-il vraiment de brandir quelques mots-clés pour séduire les consommateurs écoanxieux ? Dégainer des superlatifs est-il le gage d’un discours convaincant ? Et comment distinguer la véritable couleur d’une attraction, d’un hébergement ou d’une organisation parmi cinquante nuances de vert ?

Martelés à l’infini, les mots «bio», «durable», «responsable» et «écolo» en viennent parfois à perdre leur sens. La ligne entre un marketing outrancier et la mise en valeur de réels efforts est quelquefois bien difficile à tracer. Alors, comment mettre en valeur l’engagement d’une entreprise sans tomber dans l’excès ? Voilà qui demande réflexion.

Qu’est-ce que l’écoblanchiment?

Larousse définit l’écoblanchiment par l’« utilisation fallacieuse d’arguments faisant état de bonnes pratiques écologiques dans des opérations de marketing ou de communication » (1), (voir aussi Écoblanchiment). Calque de l’anglais pour greenwashing, « blanchiment vert » est également parfois entendu, tout comme « lavage vert » ou « maquillage vert ». Pour un entrepreneur, bien communiquer ses bons coups en matière d’écoresponsabilité relève du travail d’équilibriste.

Volontaire ou non, l’utilisation trompeuse d’arguments portant sur de bonnes pratiques écologiques ou responsables pour améliorer l’image de l’entreprise survient quand les bénéfices réels du produit ou du service pour l’environnement sont minimes ou quand la démarche de transition durable mise en valeur est partielle ou peu solide. On assiste à des comportements similaires dans la sphère sociale – le socioblanchiment ou social washing (2) –, quand des compagnies mettent de l’avant leurs actions positives afin de faire leur propre promotion ou quand elles tentent de faire oublier leurs impacts négatifs en attirant l’attention sur leurs bons coups, par exemple en versant une importante somme à une œuvre caritative. 

Pourquoi ne plutôt pas miser sur la transparence ?

Les consommateurs sont de moins en moins dupes. Les voyageurs avertis recherchent des expériences de tourisme durable en accord avec leurs valeurs et repèrent plus facilement qu’avant les messages trop appuyés. C’est un peu comme l’abus de filtres Instagram qui nous magnifient même dans nos plus mauvaises journées : ça peut être joli, mais ce n’est pas la réalité.

Verdir sans mentir

Vous vous rappelez la première fois où vous avez lu la phrase « Pensez à l’environnement, réutilisez votre serviette » dans un hôtel. Maintenant très répandus, les écriteaux qui l’arborent sont souvent cités en exemple quand on parle d’écoblanchiment. À la base, l’idée de consommer moins d’eau et de détergent est louable, mais dans les faits, pour plusieurs hôteliers, il s’agit simplement d’une manière d’augmenter les profits (3). Entre ce message vertueux destiné aux clients et les pratiques de l’entreprise, la cohérence n’est pas toujours au rendez-vous. Heureusement, les choses tendent à changer et on constate de plus en plus d’engagements ancrés dans des pratiques durables.

Quand un réel engagement rencontre une diminution des coûts, c’est gagnant-gagnant tant pour l’entreprise que pour les consommateurs soucieux de leur impact. Mais pour qu’ils le sachent, encore faut-il pouvoir leur communiquer l’information de manière adéquate et honnête, en respectant leur intelligence et leur sens critique. La sensibilisation va dans les deux sens : les voyageurs posent plus de questions et les prestataires de services doivent pouvoir y répondre.

Dénoncer les faussaires !

Sur son site (4), le gouvernement du Canada rappelle que les déclarations environnementales fausses, trompeuses ou non fondées peuvent avoir une incidence légale. Car si l’offre de produits écologiques a augmenté à la suite de la demande croissante des gens, l’écoblanchiment a crû au même rythme. Le Bureau de la concurrence, qui contrôle l’application de la Loi sur la concurrence, la Loi sur l’étiquetage des textiles et la Loi sur l’emballage et l’étiquetage des produits de consommation, dit prendre les déclarations environnementales au sérieux et intervenir en vertu des lois dont il est responsable.

Après avoir, en mars 2022, proposé de bannir les allégations environnementales génériques et vagues comme « écoresponsable » ou « produit vert », la Commission européenne a présenté en mars 2023 un plan pour éliminer l’écoblanchiment. Des sanctions dissuasives sont prévues pour toute allégation qui ne s’appuie pas sur des bases scientifiques et factuelles. De nombreuses questions demeurent toutefois. Par exemple, des ONG déplorent l’absence d’interdiction pour l’utilisation des termes touchant la neutralité carbone et le zéro émission (5).

L’importance d’être bien encadré

Bien que la faute ne soit pas toujours intentionnelle, les entreprises peuvent recourir aux services d’experts qui les aideront à éviter de tomber dans le piège de l’écoblanchiment (6). Au Québec, différentes entreprises proposent ce type de services, vous pouvez entre autres visiter le répertoire des membres de TDQ pour trouver de l’accompagnement. 

Envie de rejoindre le mouvement Tourisme durable Québec?  C’est par ici pour connaître les avantages et par ici pour l’adhésion.

Texte par Marie-Julie Gagnon

Pour aller plus loin :

Lectures

Le grand mensonge vert

L’outil en ligne anti greenwashing

Balado

Le piège de l’écoblanchiment

Lire aussi :

Communication responsable : quand les babines suivent les bottines

Le numérique responsable, de quoi parle-t-on?

Sources   :

(1) Écoblanchiment, Larousse 

(2) What is social washing ? ESG The Report (2023)

(3) Le grand mensonge vert, Jean-Sébastien Trudel avec Kathy Noël, Éditions Transcontinental (2010)  

(4) Déclaration environnementale et écoblanchiment, Gouvernement du Canada (2021)

(5) Écoblanchiment : l’Union européenne veut faire le grand ménage sur les étiquettes, Radio-Canada (2023)

(6) Le génie comme antidote à l’écoblanchiment, Philippe Jean Poirier, Les Affaires (2023)

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